La pensée symbolique est une véritable bouffée d’air dans un monde moderne ultra-rationnel qui coupe des émotions et du sensible. Cette façon de penser m’équilibre énormément dans ma vie et peut t’apporter un point d’appui pour revenir en toi, mieux te connaître et mettre de la lumière sur tes ombres.

Si tu es sur un chemin d’individuation, alors la suite de cet article va t’intéresser.

La vision symbolique, qu’est-ce que c’est ?

Etymologiquement, “symbole” est extrêmement riche de sens. Sym vient de l’indo-européen “sém” qui signifie ensemble, un et “ballo” qui veut dire jeter, lancer. La symbolique, c’est jeter ensemble, mettre ensemble.

A l’origine, le symbolon est un médaillon que deux personnes séparent en deux et chacun garde une moitié pour faire reconnaître une relation d’hospitalité qui a été contractée.

J’aimerais mettre en lumière deux couples dialogiques pour explorer cette notion de symbolique.

Symbolique et diabolique :

Le symbole est l’antonyme du diable, littéralement. Le diable n’est pas un vilain méchant avec une queue rouge et un trident. Ca c’est le fantasme de Disney. Le diable est littéralement celui qui divise ce qui est un. Etymologiquement, ça vient de “diabolos”, qui désunit.

C’est dans ce sens là que tout ce qui divise est diabolique.

Le symbole rassemble, il recrée du lien et de la circulation là où il n’y en avait plus. Le symbole recrée une unité fondamentale et sort de la séparation.

Symbolique analogique et rationnel logique :

La vision symbolique est analogique, elle fonctionne par association libre, image et métaphore.

La vision rationnelle est logique, elle fonctionne sur la raison et le discours, c’est le “logos”. Elle se cantonne à ce qui est mesurable, prouvé, chiffré.

La vision symbolique invite l’irrationnel dans la danse et c’est pourquoi elle décontenance nos petits esprits rationnels qui ont été abreuvé par le discours “la science détient la vérité”, qui n’est que le scientisme, la dérive idéologique de la science.

Attention à la dualité apparente, ce sont deux modes de fonctionnement qui sont différents et complémentaires. Il ne s’agit pas de les opposer et d’étiqueter de bien/mal ou de glop/pas glop.

Ce serait aussi absurde que d’opposer centre mental et centre émotionnel, homme et femme. Il s’agit plutôt de savoir passer librement d’un mode à l’autre, pour développer notre souplesse psychique. Cela aide à sortir de nos identifications.

J’aimerais te partager plusieurs illustrations qui invitent à sentir les limites de la pensée logique rationnelle :

  • Etienne Jalenques, psychothérapeute, mène un groupe de thérapie aux Etats-Unis. Une personne du groupe est en train de revivre le trauma où la police est survenue à son domicile et de vivre beaucoup d’intensité émotionnelle. Au même moment, des policiers entrent dans la pièce, alertés par les bruits.
  • En 8 mois je développe 3 otites en l’espace de 8 mois, alors que je n’en avais pas eu depuis plus de 20 ans. Je ne me suis pas baigné ni mis la tête sous l’eau. Mon corps avait évidemment un message pour moi.
  • Récemment je lisais l’autobiographie de Alejandro Jodorowsky et tombe sur un passage sur son film “la montagne sacrée” où il raconte le tournage. Le lendemain, un pote me parle du film “la montagne sacrée” pour me demander si je l’ai vu… Autant dire que je l’ai mis dans ma liste de films à voir !
  • Lors d’une formation, la formatrice me raconte qu’une de ses clientes a rêvé de son frère au moment même où il est décédé d’un arrêt cardiaque. Des exemples de ce type, entre des jumeaux également, j’en ai entendu des caisses.

D’un point de vue rationnel ça n’a aucun sens, il n’y a pas de preuve. Une partie de moi peut se dire “mouais, c’est juste une coïncidence” ou “c’est un biais de sélection” Il y a un certain nombre de mécanismes de la pensée rationnelle pour rejeter en bloc la pensée symbolique. (cf les mécanismes de défense)

Sauf que l’inconscient se fout de la rationalité : ce n’est pas son langage !

On peut nier en bloc que l’estomac est un simple organe et n’a rien à voir avec les émotions, car ça n’est pas factuel. Pourtant, l’ulcère est bien connu chez les gens qui rongent leur frein et refoulent leur colère. Le langage courant nous renseigne d’ailleurs fort bien “je me sens ulcéré”.

Je te passe le classique exemple du mal de dos avec le fait d’en avoir plein le dos. C’est le cas de tellement de symptômes qu’il faut vraiment ne pas vouloir voir ! D’où l’adage “il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir” ou ma variante “il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre”, d’où mes otites à répétition…

Chaque mode peut se décider en conscience : imaginons que je me fais mal à l’épaule. Je peux activer mon mode rationnel, chercher la cause mécanique, revoir le geste que j’ai fait, chercher le meilleur remède…

Je peux aussi activer mon mode symbolique, regarder quand ça a eu lieu, ce que je me disais à ce moment là, dans quel contexte de vie ça apparaît, quelle symbolique a l’épaule, de quel côté…

“Quel est le point de vue le plus juste ?” peuvent se demander certaines personnes.

Il n’y en a pas ! On serait encore dans une logique diabolique en se plaçant dans une dialectique vrai/faux.

Selon le cadre de référence dans lequel tu te places, quelque chose de juste à un moment devient faux. Il est admis que 1+1 = 2. C’est vrai… Dans un cadre arithmétique. Dans un cadre binaire, 1+1 = 10. Dans la logique booléenne, 1+1=1.

Pensée rationnelle et pensée symbolique se complètent et se rapprochent plus du réel que rester bloqué sur l’une ou l’autre.

L’inconscient est partout

Dans les milieux hypnose et développement personnel, on entend souvent parler du conscient et de l’inconscient. On dit que le conscient représente 5% et l’inconscient 95%. En vrai, ces pourcentages viennent de l’esprit rationnel.

Dans la réalité, nos processus inconscients conditionnent l’intégralité de notre vie, de nos décisions, de nos croyances, de notre état de santé. Notre volonté n’a qu’une place marginale alors que nous aimons à nous raconter que nous avons le contrôle.

Il serait bien impossible de résumer ça à un pourcentage, même si c’est un langage qui rassure notre tête.

D’ailleurs la séparation conscient/inconscient est surtout une question de langage car dans la réalité tu es UN et indivisible.

Il y a une intrication permanente dans toutes les parties de notre être, de la même manière que dans notre corps, les muscles sont intriqués avec les fascias et les organes.

Pour amener plus de finesse, il est à important d’avoir à l’esprit que ton inconscient est un enchevêtrement de plusieurs inconscients fonctionnant à la manière des poupées russes :

  • L’inconscient personnel
  • L’inconscient familial
  • L’inconscient local/régional
  • L’inconscient culturel
  • L’inconscient de l’humanité

Ta vie est un mélange de tout ces inconscients.

Par exemple, si tu vis depuis des décennies aux Etats-Unis, une culture dont l’inconscient dit “crée ta propre liberté via l’entrepreneuriat”, alors que ton inconscient familial est plutôt influencé par “ne prends pas de risque, reste dans le cadre”, tu vas avoir un conflit interne qui peut rendre difficile l’entrepreneuriat.

Ces différentes énergies dansent à l’intérieur de nous et créent une résultante : notre vie.

Pour observer les programmes inconscients que nous avons en nous, il suffit d’observer tout ce que nous voyons autour de nous : maison, compagnon de vie, vêtements, travail, voiture…

Le prérequis pour adopter la vision symbolique

Il est fréquent de vouloir sculpter l’inconscient selon notre volonté, ce qui est une hérésie quand on y pense.

Vouloir prendre le contrôle sur ton inconscient, c’est comme te tenir face à un océan déchaîné avec un gros bâton et crier de toutes tes forces “je vais te dominer, c’est moi le maître !!!”… Jusqu’à ce qu’une vague t’emporte 10 secondes plus tard.

La part inconsciente de toi dirige ta vie pour une très large part. C’est ce qui contrôle ton système nerveux autonome (ton cœur, ta respiration, ta digestion, la synthèse des hormones, la régénération cellulaire, les cycles biologiques…), tes croyances, ton langage non verbal, les mots et la façon dont tu t’exprimes…

Dans ma perception il s’agit plutôt d’entrer en lien et en connexion, pour rencontrer notre inconscient plutôt que chercher à le sculpter sur nos fantasmes.

Pour te donner une image, c’est comme chercher à rencontrer un animal sauvage, en allant à sa rencontre tranquillement au lieu de chercher à le capturer pour le sculpter selon mon désir.

Dans le Petit Prince, le renard symbolise cette part sauvage que le Petit Prince a envie d’apprivoiser pour s’en faire un ami. Pour cela, chaque jour, il se rapproche jusqu’à devenir son ami.

La pensée symbolique nécessite un double mouvement : 1/ Lâcher prise sur le pôle masculin 2/ S’ouvrir au pôle féminin

En effet, bien des gens qui se déclarent d’un esprit cartésien incapables de lâcher le contrôle du mental ont une réticence naturelle à la vision symbolique.

C’est légitime et c’est souvent le symptôme d’une peur de lâcher ce qu’ils croient être très tangible : les mots, les chiffres, les études, les diplômes (le monde de papa).

Il y a un besoin de se rassurer avec une idée de stabilité du réel, avec des grandes lois, des grands principes tangibles sur lesquels on peut s’appuyer pour en venir à “ok j’ai compris comment le monde fonctionne et c’est comme ça.”

Ca peut tellement être effrayant de vivre dans un monde chaotique que nous ne comprenons pas… d’où toutes la recherche de sens permanent chez l’être humain.

N’oublions pas qu’avant d’entrer dans le monde de papa, l’enfant vit en permanence dans ce monde du merveilleux, du rêve, de l’inconscient : le monde de maman.

A ce sujet, Jean Piaget parle de fonction symbolique qui permet à l’enfant d’accéder à un monde de représentation. Ce psychologue suisse est reconnu mondialement pour ses travaux sur le développement cognitif de l’enfant et sur comment l’enfant interagit avec le monde.

Pour Piaget, la fonction symbolique désigne l’utilisation de signifiants pour représenter une réalité cachée, absente ou imaginaire.

Le monde de maman, ce monde inconscient qui fonctionne par symbole, par analogie, complètement intemporel, peut déconcerter fortement les adultes que nous sommes qui aimons le tangible.

C’est le monde des métaphores, des paraboles, de l’art, des symboles…

Les textes sacrés, les films, les livres, les poèmes, nous parlent à un niveau inconscient et c’est pour cela que cela nous marque. Jésus avec ses pains et son vin, c’est une parabole. Le jardin d’Eden et le serpent, c’est une parabole.

Les films cultes tels que le seigneur des anneaux, Harry Potter, Matrix, Blade Runner ou encore le Truman Show, sont des mythes qui ont plus de profondeur qu’une simple œuvre cinématographique qui serait là pour divertir. Encore faut-il avoir cette conscience et accepter de se laisser toucher.

C’est personnellement le choix que j’ai fait. J’ai longtemps tourné en dérision la vision symbolique en valorisant l’esprit rationnel, croyant que le monde était explicable par des principes.

Certains événements m’ont amené à mettre de l’eau dans mon vin. J’ai fini par assumer que j’avais surtout peur de m’ouvrir au féminin et tout ce qui va avec.

En tant qu’homme, il y a tout un formatage socioculturel de refus du féminin qui est magnifiquement illustré par l’interdiction de pleurer ou d’exprimer ses émotions.

Petit problème : l’homme a aussi une polarité féminine et, lorsqu’il s’en coupe, il se coupe d’une partie de lui…

S’ouvrir à la pensée symbolique, c’est s’ouvrir au monde des émotions, de la sensibilité, de l’interprétation, de l’intuition.

C’est passer du monde du FAIRE au monde de l’ÊTRE (et faire depuis un autre endroit).

C’est arpenter ta propre quête initiatique, quelle que soit ta démarche spirituelle.

La vision symbolique pour expérimenter notre inconscient

Comment explorer la dimension symbolique de l’existence ?

Il y a tellement de pistes que je ne serai pas exhaustif : les mythes, les archétypes, les symboles…

L’approche par la symbolique est une magnifique exploration de nos zones d’ombre, étape nécessaire pour toute démarche d’individuation.

Je peux explorer :

  • Le monde onirique avec l’analyse symbolique de mes rêves (pendant la nuit ou les rêves éveillés d’ailleurs)
  • Les mythes qui mettent en scène des archétypes (les films et rêves peuvent en faire partie) : mythe de Prométhée, d’Hercule, de Faust, d’Orphée, d’Icare… (cf les travaux de Luc Bigé)
  • Les signes et symboles dans mon quotidien avec tout ce que je peux constater de moi : lieu de vie, voiture, métier, vêtements, corps… Par exemple un ami vient d’acheter une moto et dans le contexte de sa vie je trouve ça extrêmement intéressant de voir ce que ça dit de lui.
  • Les événements répétitifs : dans une relation, dans mon travail, dans un comportement que je répète (addiction, TOC…)
  • Les symptômes et les maladies : au-delà de la cause mécanique (je mange trop de chocolat alors je me crée une crise de foie), je peux me questionner sur le message de ces symptômes comme ce fut le cas de mes otites.
  • Le langage et toutes ses expressions : dans notre langue, il y a énormément d’images et de métaphores.

Je t’invite à sentir quelle voie tu as envie d’explorer.

Pour ma part, j’ai eu envie de creuser les mythes grecs puisque ça colle très bien avec mon fonctionnement et mes sujets d’intérêt. Ensuite j’ai exploré plus en profondeur mes rêves car c’est une porte directe sur ce qui se passe inconsciemment dans ma vie.

En ce moment je m’amuse à regarder ce qui se cache derrière les phobies : pourquoi telle personne a peur des escargots, telle personne des serpents ?

L’inconscient est tellement bavard par les manifestations extérieures que ce serait dommage d’occulter ça et d’attribuer au hasard ou de chercher une cause rationnelle alors qu’il y a un boulevard à explorer via une phobie (par exemple).

Et toi, qu’est-ce qui t’appelle ?

Quelques conseils pour démarrer une exploration symbolique

  • Apaiser le système nerveux (cf la théorie polyvagale) : cohérence cardiaque, méditation… car un cerveau sous stress ne peut pas lâcher prise et se détendre.
  • Utiliser le journaling : l’écriture est une formidable porte d’entrée dans le monde de l’inconscient.
  • Sortir du temps : la logique productiviste n’a pas sa place ici, il s’agit de prendre son temps, d’autant que l’inconscient est hors du temps !
  • Noter ses rêves : prendre un temps chaque jour pour noter tes rêves indique à ton inconscient tu mets de l’attention dessus, tu t’en rappelleras mieux.
  • Ecouter les élans : la voie des mythes est arrivé sur mon chemin comme un cheveu sur la soupe. J’ai juste tiré la pelote de laine à mesure que ça s’est présenté ! Ensuite interpréter mes rêves a attiré de plus en plus mon attention.

Quelques livres à explorer

Sur le symbolisme des maladies (à prendre avec des pincettes, toujours) : le livre “le grand dictionnaire des malaises et des maladies” de l’auteur Jacques Martel et le livre “dis-moi où tu as mal, je te dirai pourquoi” de l’auteur Michel Odoul.

Sur le symbolisme des mythes : tous les livres de l’auteur Luc Bigé. Parmi les livres qui m’ont marqué, j’ai beaucoup aimé le livre “la voie du héros : les douze travaux d’Hercule” et le livre “l’éveil de Narcisse”.

Sur les rêves : le livre “inner work” de l’auteur Robert Johnson

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